L’éducation thérapeutique atténue l’état dépressif des malades chroniques

 Un essai clinique prouve l’efficacité de l’éducation thérapeutique réalisée par des infirmières en collaboration avec des médecins généralistes dans la réduction de l’état dépressif de patients souffrant d’un diabète non contrôlé ou d’une maladie cardio-vasculaire.

Un essai randomisé contrôlé américain de Katon et ses collaborateurs publié dans la revue New England Journal Medicine en 2010 teste les bénéfices d’un programme d’éducation thérapeutique sur la dépression et sur l’état de santé de patients souffrant d’un diabète non contrôlé ou d’une maladie cardio-vasculaire. Le programme est réalisé par des infirmières et des médecins généralistes. Les résultats de l’étude indiquent une meilleure observance médicamenteuse, un meilleur contrôle de la maladie organique et une réduction de l’état dépressif du groupe de patients ayant suivi le programme d’éducation thérapeutique comparé au groupe contrôle suivant les recommandations standards.


Le rationnel de l’étude

Les patients souffrant de plusieurs maladies concomitantes sont plus difficiles à soigner. Ils sont plus vulnérables aux agents pathogènes. Ils risquent plus souvent d’être hospitalisés. Le coût de leurs soins est multiplié par 4. Une possibilité d’améliorer leur état de santé est l’éducation thérapeutique.

L’éducation thérapeutique pourrait être une solution très bénéfique aux patients souffrant de plusieurs maladies chroniques.

La question posée

Les personnes souffrant d’un diabète mal contrôlé ou d’une maladie cardio-vasculaire associé à une dépression bénéficient-elles vraiment d’un programme d’éducation thérapeutique réalisée par une infirmière en collaboration avec un médecin généraliste?

Le protocole

L’essai randomisé contrôlé teste l’efficacité d’un programme d’éducation thérapeutique impliquant une infirmière et un médecin généraliste. L’étude porte sur 214 patients âgés en moyenne de 56 ans. Un programme d’un an d’éducation thérapeutique est proposé aux participants du groupe intervention non médicamenteuse. Le professionnel impliqué est une infirmière expérimentée dans le contrôle du diabète, la gestion d’une maladie cardio-vasculaire et les stratégies à adopter pour faire face à une dépression. Elle collaborait avec un médecin généraliste. Ils proposaient un guide complet sur le contrôle médicamenteux de ces maladies, sur le management de la dépression et sur l’optimisation de l’état de santé. Ils rencontraient le patient toutes les 2 à 3 semaines. Ils faisaient le point sur les médicaments pris (contre l’hypertension, l’hyperlipidémie, l’hyperglucidie et la dépression) et la manière de les prendre conformément aux prescriptions médicales. Les infirmières étaient formées aux principales stratégies motivationnelles (planification, gestion de problème, activation comportementale). Elles encourageaient les patients à suivre les traitements, à contrôler l’évolution de leur maladie (par exemple par des auto-mesures de la glycémie) et à mieux gérer leur santé. Une vidéo et un livret étaient donnés au patient sur les manières de faire face à une dépression associée à une maladie organique. Les infirmières étaient supervisées chaque semaine par un psychiatre, un médecin généraliste et un psychologue pour tout nouveau cas. Une fois le patient autonome dans le contrôle de sa maladie, un plan de maintien autonome était proposé. L’infirmière rappelait au téléphone chaque patient tous les mois pour vérifier le bon déroulement de ces procédures autonomes. Les patients du groupe contrôle suivaient les soins courants. Ils étaient encouragés à consulter leur médecin traitant en cas de dépression.

Les résultats principaux

Les résultats mettent en évidence une amélioration des marqueurs biologiques des maladies organiques (taux d’hémoglobine glyquée, de LDL, de cholestérol, de pression artérielle) pour le groupe éducation thérapeutique comparé au groupe contrôle. Les patients diminuent également leur niveau de dépression. Les patients expriment une satisfaction supérieure vis-à-vis de leurs soins et une meilleure qualité de vie.

L’éducation thérapeutique améliore l’observance médicamenteuse des patients souffrant de plusieurs maladies chroniques. 


Le message pour les patients

L’éducation thérapeutique a amélioré l’état de santé des patients malades chroniques, notamment en diminuant leur état dépressif.

Le message pour les professionnels

L’éducation thérapeutique réalisée par une infirmière en collaboration avec un médecin généraliste améliore l’observance médicamenteuse. En revanche, elle n’a aucun effet sur l’alimentation et l’activité physique hebdomadaire.

Le message pour les chercheurs

Les résultats d’un essai randomisé contrôlé testant une intervention non médicamenteuse comme l’éducation thérapeutique peuvent être publiés dans une des revues scientifiques médicales les plus renommées au monde, le New England Journal of Medicine.

Le message pour les décideurs

Les patients malades chroniques complexes, c’est à dire souffrant de plusieurs maladies en même temps, devraient bénéficier systématiquement d’un programme d’éducation thérapeutique. L’étude en fait une belle démonstration dans le cadre d’une maison de santé par le travail coordonné d’une infirmière et d’un médecin généraliste.


La référence

Katon WJ, Lin EH, Von Korff M, Ciechanowski P, Ludman EJ, Young B, Peterson D, Rutter CM, Mc Gregor M, McCulloch D (2010). Collaborative care for patients with depression and chronic illnesses. New England Journal Medicine, 363, 2611-2620.


Pour citer cet article du Blog en Santé ©

Ninot G (2014). L’éducation thérapeutique atténue l’état dépressif des malades chroniques. Blog en Santé, A31.

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