Réduire la dépression des patients atteints d’un cancer du poumon

Un essai clinique compare l’efficacité d’un programme de traitement intégré pour soigner la dépression des patients atteints d’un cancer du poumon par rapport aux soins habituels.

Un essai randomisé contrôlé anglais de Walker et ses collaborateurs publié dans la revue The Lancet en 2014 teste l’efficacité d’un programme associant un traitement antidépresseurs et un soutien psychosocial sur la sévérité de la dépression de patients atteints d’un cancer du poumon. Les résultats montrent que ce type d’intervention réduit la sévérité des symptômes dépressifs des patients cette intervention par rapport aux patients suivant les soins courants.


Le rationnel de l’étude

18% des décès par cancer dans le monde sont liés au cancer du poumon. Son incidence annuelle continue d’augmenter, notamment chez les femmes. Seulement 13% des patients survivent 5 ans après le diagnostic. Les patients atteints de ce type de cancer présentent généralement un trouble dépressif majeur sévère. Cette comorbidité a des effets néfastes sur les symptômes, l’autonomie et la qualité de vie des patients. Pour ceux qui présentent un mauvais pronostic, le vécu de la dépression détériore souvent la courte période qu’il leur reste à vivre. La gestion de la dépression majeure chez les patients atteints d’un cancer du poumon représente alors un véritable challenge. Bien que des traitements antidépresseurs efficaces soient disponibles pour les personnes de la population générale diagnostiquées avec une dépression, il est impossible de transposer ces bénéfices sur la dépression de personnes atteintes d’un cancer du poumon. C’est pourquoi, les auteurs s’interrogent sur l’efficacité d’un programme de soins associant un traitement antidépresseur et un soutien psychosocial par rapport aux soins courants.

La plupart des patients atteints d’un cancer du poumon vivent un trouble dépressif majeur qui détériore davantage le pronostic déjà mauvais de ce type de cancer. Les chercheurs s’interrogent sur les bénéfices que pourraient avoir l’association d’un traitement par antidépresseur et d’une intervention non médicamenteuse. 

La question posée

Une intervention psychosociale de la part d’infirmières associée à un traitement antidépresseur est t’il efficace chez les patients atteints d’un cancer du poumon?

La méthode

L’essai randomisé contrôlé anglais de Walker et ses collaborateurs teste l’efficacité d’un programme associant une intervention psychosociale à un traitement antidépresseur chez des patients âgés de plus de 18 ans atteints d’un cancer du poumon et présentant un trouble dépressif majeur. La survie prédite des patients était d’au moins 3 mois.

142 patients ont été répartis aléatoirement dans deux groupes différents. 68 patients ont suivi le programme innovant durant quatre mois. 74 patients ont suivi les soins habituels. Pour ces derniers, les médecins et oncologues ont été avertis du diagnostic de dépression des patients. Les patients étaient encouragés à aller voir leur médecin pour obtenir un antidépresseur. La mesure principale concerne la sévérité de la dépression évaluée tous les mois grâce au questionnaire PHQ-9. Le suivi a duré 8 mois.

L’intervention non médicamenteuse (INM) testée

L’INM est un programme de soutien psychosocial animé par des infirmières qualifiées et formées qui a fait appel à des psychiatres et des médecins généralistes. Le programme a été intégré dans les soins du cancer du poumon. Les infirmières devaient établir une relation thérapeutique avec les patients. Elles leur fournissaient des informations sur la dépression, sur son traitement leur proposaient des techniques psychologiques telles que des stratégies de résolution de problèmes et d’activation comportementale. Elles surveillaient les progrès des patients. Les psychiatres supervisaient les interventions et les traitements afin que les objectifs soient atteints et maintenus.

L’intervention comprenait un maximum de 10 séances structurées avec l’infirmière pendant 4 mois. Cette phase commençait juste après que le diagnostic de trouble dépressif majeur soit posé. L’infirmière surveillait ensuite les scores au PHQ-9 chaque mois par téléphone pendant encore 4 mois. Tous les dossiers des patients étaient examinés chaque semaine lors d’une réunion de supervision en présence des infirmières et du psychiatre.

Les résultats principaux

Les résultats mettent en évidence une sévérité moyenne de trouble dépressif majeur moins importante pour les patients qui ont bénéficié du programme interventionnel par rapport à celle du groupe suivant les soins habituels. L’intervention a donc diminué l’impact de la comorbidité dépressive. Elle a aussi amélioré le niveau d’anxiété, l’autonomie et la qualité de vie des patients.

Il est toutefois à noter que l’intervention n’a pas eu d’effet sur la douleur, la fatigue, sur le fonctionnement physique et sur l’état de santé des patients.

Une intervention de soins de support qui intègre antidépresseur et soutien psychologiques diminue la sévérité de la dépression majeure chez les patients atteints d’un cancer du poumon par rapport aux soins courants.


Le message pour les patients

La dépression majeure peut être réduite chez les patients ayant un mauvais pronostic du cancer du poumon par un programme associant une intervention psychosociale et un antidépresseur. Ce bénéfice a entrainé une amélioration de l’anxiété et de la qualité de vie mais pas de l’état de santé, de la douleur et de la fatigue.

Le message pour les professionnels

En dépit d’une détérioration rapide de l’état de santé des patients atteints d’un cancer du poumon ayant un mauvais pronostic, l’association d’une intervention psychosociale menée par une infirmière et d’un antidépresseur améliore une des comorbidités fréquentes chez ces patients, le trouble dépressif majeur. Ce programme faisant intervenir également des psychiatres et des médecins est perçu comme étant de meilleure qualité par les patients que les soins actuels. Il a également amélioré l’anxiété et la qualité de vie mais pas l’état de santé, la douleur ou la fatigue.

Le message pour les chercheurs

Cette étude montre les bénéfices d’un programme de prise en charge combinant antidépresseur et soutien psychologique sur la sévérité de la dépression. Dans un entretien qualitatif, des patients ont dit qu’il recommanderait cette intervention à leurs amis. De plus larges essais cliniques sont nécessaires pour évaluer l’efficacité et le coût-efficacité de ce type de programme réduisant une comorbidité fréquente dans le cancer du poumon, la dépression. De plus, une adaptation plus poussée du programme est nécessaire pour répondre aux besoins des patients non satisfaits.

Le message pour les décideurs

Un programme de prise en charge combinant antidépresseur et soutiens psychologique de 4 mois réduit la sévérité d’une des comorbidités majeures du cancer du poumon, la dépression. Des recherches restent à mener pour optimiser les soins de support en oncologie.


La référence

Walker J, Hansen CH, Martin P, Symeonides S, Gourley C, Wall L, Weller D, Murray G, Sharpe M (2014). Integrated collaborative care for major depression comorbid with a poor prognosis cancer (SMaRT Oncology-3): a multicentre randomised controlled trial in patients with lung cancer. Lancet, 15, 1168-1176.


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Pour citer cet article du Blog en Santé ©

Ninot G (2015). Réduire la dépression des patients atteints d’un cancer du poumon. Blog en Santé, A57.

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